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Le nombre de successions non réclamées bondit

25 octobre 2010

Un texte de Jean-François Cloutier

Le nombre de dossiers de successions non réclamées qui aboutissent à Revenu Québec connaît une hausse importante depuis trois ans.

La dernière recension de Revenu Québec, qui date du 19 octobre, fait état de 5346 dossiers ouverts, dont la valeur totalise 38,8 M$. Il s’agit d’une augmentation de 36% par rapport au nombre de successions non réclamées au 18 octobre 2008, où leur valeur s’établissait à 34,4 M$, selon des données obtenues par Argent.

Chaque mois, Revenu Québec publie dans des quotidiens du Québec un Avis de qualité donnant le nom de personnes dont les biens n’ont pas été réclamés.

La porte-parole de Revenu Québec, Valérie Savard, attribue la hausse survenue au cours des dernières années à une meilleure publicité effectuée par le gouvernement.

«Revenu Québec est maintenant l’unique administrateur des biens non réclamés et il maintient un registre des biens non réclamés accessible dans son site internet, donc accessible à un plus grand nombre de personnes», avance-t-elle.

Selon Nancy Émond, notaire dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et participante à la ligne 1-800-Notaire, l’isolement croissant de nombreuses personnes âgées pourrait cependant être aussi en partie à l’origine de cette progression. «Il y a de plus en plus de gens seuls, surtout dans les grands centres », signale-t-elle.

Me Émond explique que le plus grand nombre de successions non réclamés concerne des gens décédés dans la pauvreté, habituellement prestataires de l’aide sociale. Les montants en cause sont trop petits pour attirer l’attention d’héritiers potentiels, selon elle.

«Les gens de leur famille renoncent à réclamer la succession car ils craignent d’avoir à assumer les dettes de la personne», explique-t-elle.

De fait, des 5346 dossiers de successions non réclamées ouverts chez Revenu Québec, 68% concernent des montants inférieurs à 500$.

Après dix ans, les sommes non réclamées sont récupérées par le fisc et sont versées dans le Fonds des générations, selon ce qu’indique Revenu Québec. Dans le cas de successions déficitaires, Revenu Québec s’occupe de liquider la succession en informant les créanciers qu’ils ne pourront pas être remboursés.

La pointe de l’iceberg

Selon Christophe Savary, chercheur d’héritier et pdg d’Étude Généalogique Savary, à Trois-Rivières, les successions non réclamées qui aboutissent à Revenu Québec représentent la pointe de l’iceberg d’un phénomène plus large : l’augmentation du nombre de successions problématiques dans la foulée de transformations sociales.

M. Savary, qui cumule vingt ans d’expérience dans son métier, dit constater une croissance de 10 à 15% par année du nombre de dossiers qui aboutissent dans son bureau. «Des notaires me contactent parce qu’ils n’arrivent tout simplement pas à retrouver les héritiers d’une succession», explique-t-il.

M. Savary mentionne que des cas problématiques concernent de plus en plus des frères et des sœurs d’une personne décédée, voire des enfants. «Certaines familles ont éclaté à cause de querelles financières et leurs membres n’ont plus aucun contact entre eux », dit-il.

Me Dominique Lettre, notaire et conseillère juridique sur la rive-sud de Montréal, pense que le nombre de successions problématiques ou non réclamées pourrait continuer de s’accroître dans les prochaines années, en raison de l’arrivée de nombreux immigrants au pays dans les dernières décennies et du fait que plusieurs héritiers pourraient être difficiles à retrouver dans leurs pays d’origine.

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